44 – Êtes-vous la Tarîqah de René Guénon ? …

… puisque vous faites tant référence sur votre site à Cheikh Abd el-Wâhid Yahyâ.

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Aussi curieuse, sous plus d’un rapport, que puisse paraître cette question nous décidons d’y répondre avec l’espoir d’apporter des précisions sur ce qu’elle implique, directement ou indirectement.

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18 août – V2*

La première des raisons pour lesquelles nous ne pouvons répondre que par la négative à cette interrogation est que, comme c’est assez généralement connu, Cheikh Abd el-Wâhid Yahyâ –radiy-Allah ‘anhu– a toujours expressément affirmé qu’il n’avait pas de disciple au sens technique et habituel du terme dans le Taçawwuf, c’est-à-dire qu’il ne pouvait, sous aucun rapport, être considéré comme investi d’une fonction initiatique au sein d’une quelconque silsilah alors même, comme on le sait également, qu’il était lui-même rattaché à au moins une Tarîqah 1 .

 La seconde raison, et bien que la précédente suffise en réalité à clore tout débat éventuel à ce propos, est que les références que nous pouvons être amené à utiliser ne le sont jamais qu’au titre de moyens en quelque sorte didactiques : nous pensons que la qualité même de l’œuvre de René Guénon est, par nature et destination, propre à faciliter l’exposition et la compréhension d’un certain nombre de notions traditionnelles au public occidental ou occidentalisé.

C’est l’occasion, d’ailleurs, de préciser que, malgré cette excellence et l’usage que nous faisons de l’œuvre de cet auteur pour exposer en Occident certaines considérations générales sur le Taçawwuf et certains aspects propres à la Tarîqah Mohammediyyah Chadhiliyyah ou à d’autres turûq, il n’est pas davantage possible de dire ou de croire que les conceptions et les pratiques qui sont celles de la Tarîqah seraient pour autant « celles » de Cheikh Abd el-Wâhid : il va de soi que nous exposons ces aspects en puisant dans son œuvre lorsque cela nous semble possible et favorable tout comme nous tenons ultimement à donner la priorité aux données de la Tarîqah lorsqu’il s’agit d’aspects caractéristiques et qui la définissent en propre, même lorsque ceux-ci peuvent apparaitre, à certains ou d’une certaine manière, différents de ce qui se trouve dans l’œuvre publique de René Guénon ; sous ce rapport non plus, la Tarîqah Mohammediyah Châdhiliyah n’est pas la « Tarîqah du Cheikh Abd el-Wâhid » –radiy-Allah ‘anhu.

Plus généralement, nous tenions à rappeler aussi clairement que possible ce qui devrait, selon nous, rester une évidence : ni le contenu de l’œuvre de Cheikh Abd el-Wâhid ni l’intérêt que l’on peut, à juste titre, y porter ne permettent, par eux-mêmes, de prétendre édifier une méthode initiatique qui se substituerait aux dispositions propres à telle ou telle tarîqah régulière, quelle qu’elle soit et notamment celle à laquelle on est rattaché.

Pour conclure, et sans que cela remette le moins du monde en cause ce qui vient d’être évoqué, nous tenions à témoigner du fait que les parentés initiatiques existant entre Cheikh Abd el-Wâhid et la Tarîqah Mohammediyyah Châdhiliyyah se sont, à travers le temps, accompagnées non seulement de relations personnelles naturelles entre différentes individualités concernées mais aussi et surtout de l’existence d’interactions étroites, ou de ce que l’on peut appeler sans excès d’ « influences spirituelles » réciproques, entre certains prolongements de l’œuvre de René Guénon et le développement de celle de Cheikh Mohammed Zakî ed-Dîn Ibrâhîm 2 .

w-Allah a’lam

Mohammed Abd es-Salâm

khadîm et-Tarîqah

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  1. Il s’agit, en l’occurrence, de celle du Cheikh Salama ar-Râdî al-Châdhilî, lequel figure dans l’Ijâzah du Cheikh Mohammed Zakî ed-Dîn, cité par lui parmi les « Imâms chadhilîs » ayant échangé « des chaînes de transmission de la barakah (influence spirituelle) avec [son] vénéré père ». En dehors du lien général de silsilah évident et premier avec le Prophète ﷺ et avec le Cheikh Abu-l-Hassan Châdhilî –radiy-Allah ‘anhu, cette communauté constitue donc un lien de parenté initiatique important entre Cheikh Abd el-Wâhid et la Tarîqah Mohammediyyah Châdhiliyyah. Quant à un lien particulier, souvent évoqué sans qu’on n’en connaisse quoi que ce soit de la nature exacte, du Cheikh Abd el-Wâhid avec seyyidunâ el-Khidr –‘alayhi es-salâm-, il ne fait que renforcer la parenté initiatique déjà évoquée (puisque la Tarîqah Khidriyyah figure également dans l’Ijâzah de la Tarîqah Mohammediyah), sans rien ajouter de connu sur le plan fonctionnel []
  2. Nous limitons volontairement ici l’étude de ce que Michel Vâlsan a appelé une « lignée d’autorités » dans un de ses articles sur la nature et l’importance de l’œuvre de René Guénon, ce sujet nécessitant, à l’évidence, d’être abordé plus amplement, in châ Allah, notamment en ce qui concerne le rôle du Cheikh Elîch el-Kabîr dans une Œuvre qui prend son origine bien évidemment très au-delà des diverses individualités qui l’ont portée et la portent actuellement. []

par le 17 août 2014, mis à jour le 22 août 2014

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