Convenances spirituelles du murîd avec ses frères extraites d’Iqâdh el-Himâm (Commentaire des Hikam) – Ibn ‘Ajîbah

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Nous avons principalement choisi de présenter ce passage extrait de l’Iqâdh el-himam d’Ibn ‘Ajîbah, célèbre commentaire des Hikam d’Ibn ‘Atâ Allah es-Sakandarî, pour rappeler que l’importance des données doctrinales et des connaissances théoriques ne peut prévaloir sur le respect du caractère sacré du musulman, surtout en Occident où bien des tentatives et des efforts peuvent être si facilement remis en cause ou ruinés par l’ignorance et l’absence de respect de ces données traditionnelles, également fondamentales dans leur ordre.

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« Les convenances spirituelles avec les frères sont au nombre de quatre  1.

  •  La première consiste à préserver leur sacralité, qu’ils soient absents ou présents. On ne dira de mal de personne et on ne diminuera personne : on ne dira pas « les compagnons d’Untel sont parfaits et les compagnons d’Untel sont déficients » ou bien « Untel est Connaissant (‘Arîf) » ou « Untel n’est pas Connaissant » ou « Untel est faible » ou « Untel est fort » ou ce genre de choses, car tout cela constitue l’essence même de la calomnie, unanimement reconnue comme illicite (harâm) surtout à l’encontre des saints (awliyâ’), leurs chairs étant un poison mortel, comme les chairs des savants et des pieux. Le murîd doit donc se préserver autant que possible de cette attitude blâmable et fuir celui qui manifeste un tel comportement comme on fuit le lion.  Car celui qui agit ainsi ne réussira jamais. Les saints sont comme les prophètes ; ainsi celui qui fait des différences entre eux s’interdit de bénéficier d’eux et est ingrat envers eux. Certains soufis ont dit : « Celui que brisent les fuqarâ ne peut être réparé par le Cheikh mais celui que brise le Cheikh peut être réparé par les fuqarâ, comme on l’a vérifié avec certitude. Car la nuisance d’un unique saint n’est pas comme la nuisance de plusieurs saints. Les frères intercèdent auprès du cheikh en faveur de celui qu’il a brisé et le cœur du cheikh est ainsi réparé, à la différence des cœurs des fuqarâ dont peu guérissent après avoir changé
  •  La seconde convenance consiste à les conseiller en les instruisant de leur ignorance, en leur enseignant leur errance, en renforçant leur faiblesse, ne serait-ce qu’en voyageant chez eux, car s’y trouvent ceux du début de la Voie comme ceux de la Fin, le fort comme le faible, chacun d’entre eux mentionnant ce qui lui convient. Conformément au hadîth : « Parlez au gens selon leur compréhension ».
  •  La troisième [convenance à appliquer avec les frères] consiste à faire preuve de modestie à leur égard, d’être juste avec eux en se mettant à leur service autant que possible car « le serviteur du peuple est leur maître ». Tu dois venir en aide à celui que tu vois être occupé à quelque chose qu’il ne parvient pas à faire, dans le but qu’il le termine pour invoquer Allah, même un peu. Allah le Très-haut a dit : « Entraidez-vous dans la piété et la crainte-pieuse » [Coran, 5/2], car repousser tout ce qui occupe le cœur du murîd en dehors du dhikr relève de la guerre sainte et de la piété.
  •  La quatrième convenance spirituelle consiste à voir en eux la pureté et à croire en leur perfection. On ne dépréciera personne même si l’on peut être témoin de ce qui impliquerait extérieurement une imperfection. Le croyant devant, en effet, chercher des excuses, il lui en cherchera soixante-dix et, si la personne en question persiste dans son défaut, il le cherchera en lui-même car « le croyant est le miroir du croyant » : ce que voit l’observateur est en lui. Les gens de la pureté ne voient que le pureté et les gens du trouble ne voient que le trouble. Les gens de la perfection ne voient que la perfection et les gens de l’imperfection ne voient que l’imperfection. Comme il apparaît dans le hadîth de l’Envoyé d’Allah –sur lui la prière et la paix- que nous avons cité précédemment : « Rien n’est meilleur en l’homme que deux qualités : avoir bonne opinion d’Allah et avoir bonne opinion des serviteurs d’Allah. Rien n’est pire en l’homme que deux qualités : avoir mauvaise opinion d’Allah et avoir mauvaise opinion des serviteurs d’Allah. »

Et ce qui est propice vient d’Allah. »

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En résumé

  1. Respecter le caractère sacré du musulman
  2. Exercer le bon conseil réciproque
  3. S’entraider avec modestie
  4. Avoir bonne opinion

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  1. On pourra constater que les mêmes âdâb constituent très exactement les quatre premiers des huit convenances énoncées par Cheikh Abd el-Qâdir ‘Îssâ []

par le 14 août 2013, mis à jour le 19 août 2015

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