Précisions biographiques concernant Michel Vâlsan – Cheikh Mustaphâ Abd el-‘Azîz
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« el-‘ârif ‘ârif bi-zamâni-hi »
Nous nous permettons de donner quelques précisions concernant un passage d’une notice biographique de Michel Vâlsan publiée sur le net : « Il fut initié à l’ésotérisme islamique par l’intermédiaire de Frithjof Schuon (cheikh ‘Isa Nur ad-Din), alors mokaddem, puis il prit plus tard ses distances avec la tariqa de Schuon car celle-ci s’affranchissait de plus en plus de la forme islamique, et il s’en sépara en 1952, après avoir fondé une tariqa à Paris dans laquelle il pratiquera des rites soufis de la zaouïa Châdhiliyya de Tunis que lui-même et ses disciples ont fréquentée pendant des années. (…) Wikipédia »
Il est effectivement établi que Michel Vâlsan reçut le rattachement à la Tarîqah ‘Alawiyyah « par l’intermédiaire de Frithjof Schuon (cheikh ‘Isa Nur ad-Din) ». C’est d’ailleurs sur l’ijâzah qu’il reçut également de lui qu’il s’appuya notamment pour établir une branche de la même Tarîqah quand, en novembre 1950 (et non en 1952), il prit son indépendance d’avec son Cheikh, du vivant de René Guénon et avec son aval.
Ce n’est qu’en 1968-1969 (et non avant 1952), c’est-à-dire près d’une vingtaine d’années plus tard 1, que Cheikh Mustaphâ, qui fréquentait effectivement depuis de nombreuses années 2 le site tunisien de Sidi Belahsan, demanda et obtint 3 une ijâzah du Cheikh précédant au Cheikh actuel et qu’il instaura alors régulièrement une partie importante des rites en France, tout en gardant actives certaines pratiques de la branche alawite, notamment la transmission du wird journalier, dans une forme qui perdurera ainsi (soit pendant environ 5 ou 6 ans), jusqu’à sa mort, survenue en novembre 1974.
Si l’on peut dire que Cheikh Mustaphâ pratiqua effectivement dans sa tarîqah française « des rites soufis de la zaouïa Châdhiliyya de Tunis« , c’est bien à partir de 1968-69 qu’il faut le comprendre, date de l’obtention de l’ijâzah correspondante4 , et non pas à partir de 1952, date « parasite » dont nous ne voyons décidément pas à quoi elle correspond de cohérent.
On ne comprend d’ailleurs pas bien non plus comment il aurait pu pratiquer et faire pratiquer régulièrement les « rites soufis » en question sans disposer d’une ijâzah l’autorisant à le faire, même en ayant assisté à leur déroulement à Tunis depuis plusieurs années. Chacun connaît normalement, s’il s’intéresse avec suffisamment de sérieux et de scrupule à ces questions pour pouvoir s’exprimer sur autrui publiquement de manière nominale, une règle somme toute assez simple à comprendre : l’ancienneté en elle-même ne confère aucunement l’autorisation de pratiquer régulièrement quelque rite ou fonction initiatique que ce soit. Penser ou laisser penser que quelqu’un d’honnête et de raisonnable aurait pratiqué autrement constitue ainsi au minimum et suivant l’intention sous-jacente un colportage vide de sens et une évidente impolitesse ou relève de la pure médisance 5 .
On peut résumer ces principales phases fonctionnelles et les états correspondants de la Tarîqah comme suit :
- Rattachement de Michel Vâlsan à la Tarîqah ‘Alawiyyah par Schuon – Cheikh ‘Isâ Nûr ad-Dîn
- Réception d’une ijâzah dans cette même Tarîqah par le même transmetteur
- Prise d’indépendance d’avec Cheikh ‘Isâ – Schuon en novembre 1950, du vivant de René Guénon et avec son aval, et établissement par Cheikh Mustaphâ d’une branche de la Tarîqah ‘Alawiyyah fin novembre 50/début 51, en France
- Développement de cette branche en mode purement ‘alawî jusqu’en fin 68/69 (= 17 ou 18 ans)
- Demande et obtention d’une ijâzah au Maqâm de sidi Belahsan à Tunis fin 68/69
- Remplacement en France des rites collectifs par les rites de Tunis (légèrement adaptés pour certains) avec maintien de certaines pratiques ‘alawites, notamment le wird journalier, jusqu’en novembre 1974 (= 5 ou 6 ans)
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Il est évident que l’on ne peut réduire la biographie de Michel Vâlsan à ces quelques indications. Pour des raisons assez diverses 6 nous nous bornerons pourtant à celles-ci, principalement parce qu’elles concernent la régularité de la situation initiatique de celui qui fut l’un des principaux pionniers du développement islamique de l’œuvre de René Guénon en Occident.
Nous tenons à ne pas faire des amalgames qui n’auraient pas lieu d’être (par exemple entre certains éléments du texte qui est le sujet des présentes remarques et d’autres affirmations, car nous avons la conviction que l’auteur de la notice biographie n’a probablement pas agi avec malveillance). Il nous suffira d’insister ici sur le fait que la période de près de vingt ans qui s’est écoulée, de 1950/51 à 1968/69, respectivement entre la prise d’indépendance de Michel Vâlsan d’avec Frithjof Schuon et l’obtention de l’ijâzah de Tunis, réduit à néant l’hypothèse, émise par des personnes certainement plus ignorantes que mal intentionnées, selon laquelle Michel Vâlsan serait allé en ce sens dès 1950-52 pour compenser ou couvrir une prétendue insuffisance qu’il aurait constatée dans l’ijâzah de la Tarîqah ‘Alawyah qui lui avait été transmise.
La version que nous retenons et qui nous a été rapportée par des fuqarâ de Cheikh Mustaphâ est d’un tout autre ordre, bien plus réaliste et cohérent. Elle soutient en effet que Cheikh Mustaphâ, au terme de cette période d’environ 18 ans pendant laquelle il avait constaté la difficulté générale des occidentaux à mettre en œuvre efficacement les modalités rythmiques particulières du dhikr çadr de la ‘alawiyyah pratiquées sous sa direction en France s’est alors enquis de la possibilité de mettre en œuvre régulièrement la forme à la fois pure, dépouillée et plus aisée à pratiquer, maintenue et protégée au sein de la Tarîqah Chadhilite de Sidi Belahsan.
La persistance réelle et avérée, de 1950 à 1974, de la transmission du wird selon l’ijâzah de la Tarîqah ‘Alawiyyah 7 exclut toute hypothèse farfelue. Elle témoigne également, d’une part, du fait que Cheikh Mustaphâ, connu pour sa rigueur en ce domaine comme en d’autres, était parfaitement conscient de la validité de l’ijâzah correspondante et de sa régularité fonctionnelle et, d’autre part, de la volonté qui était la sienne de permettre à ses disciples une mise en œuvre rituelle adaptée : « Le Connaisseur est connaisseur de son temps« , dit l’adage. Radiy-Allah ‘anhu.
Et Allah est Plus-Savant
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Nota Bene – Le site Wikipedia, semble-t-il cité comme référence par l’auteur de la notice en question, orthographie correctement le nom de famille de Cheikh Mustaphâ et ne fait, par ailleurs, aucunement état de la date de 1952, à ce jour ; il indique par contre avec justesse : « En 1950, il se sépare de Cheikh ‘Isâ suite aux graves déviations intervenues dans la tarîqa. »
Puisque l’occasion se présente, rappelons enfin, même s’il s’agit là d’un aspect très secondaire, qu’il existe sur le net deux photos de Cheikh Mustaphâ dont l’une est inversée … Pourquoi ne pas utiliser la bonne ?
6 mars 2015 – V2
En voici d’ailleurs une autre, que nous trouvons sur un site italien (Scienza Sacra) qui publie, au lendemain de nos présentes précisions, la traduction (qui n’a rien d’étranger à nos remarques) d’une correspondance privée entre Frithjof Schuon et Michel Vâlsan. Nous ne connaissons pas le site en question, mais nous pouvons constater que la photo est prise « sous le même angle ».
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- Bien que nous n’ayons pu établir, à ce jour, l’année exacte, il nous apparaît que 1969 est la plus vraisemblable [↩]
- Rappelons que sa première épouse était tunisienne [↩]
- Nous tenons directement du témoin qui assista à cette transmission qu’elle eut lieu « un vendredi après le ‘açr dans la Moghârah« [↩]
- Un faqîr de Cheikh Mustaphâ nous raconta avec une certaine émotion son retour vers la France à cette époque, lorsque, après avoir enregistré pendant des dizaines d’heures les rites en question, Cheikh Mustaphâ restant à Tunis, lui montrait de la main le chiffre cinq pour insister depuis le quai du Port de la Goulette, sur les premiers Noms d’Allah du Hizb el-Bahr ; or cette anecdote ne se déroula pas avant 1952 mais en 1968-69 [↩]
- A certains de ses disciples qui s’inquiétaient de savoir comment ils devaient comprendre cet important changement méthodique et s’ils devaient se considérer alors comme des ‘alawî (en référence à la première ijâzah) ou comme des chadhilî (en référence à la seconde) Cheikh Mustaphâ aurait répondu « Comme des châdhilî« , affirmation que nous comprenons personnellement soit comme l’affirmation de la référence au « Maître fondateur », soit comme l’indication d’une modification méthodique notable, ou comme les deux à la fois. [↩]
- Principalement parce que nous n’avons pas connu Cheikh Mustaphâ ni été rattaché par son intermédiaire. Nous agissons seulement en raison d’une certaine nécessité morale et intellectuelle, sur ce sujet précis sachant l’importance qu’il revêt aux yeux de Cheikh Abd el-Wâhid et aux siens, ainsi qu’en raison de ce qui nous lie personnellement à la Tarîqah Châdhiliyyah de Tunis, wa bi-Llah et-tawfîq [↩]
- Sans compter la possibilité d’exercer la khalwah et une modalité particulière, en commun, du dhikr individuel du Nom « Allah » [↩]
par Mohammed Abd es-Salâm le 26 février 2015, mis à jour le 5 juillet 2015
Mots clés : Maqâm Châdhulî, Michel Vâlsan, Tarîqah Châdhiliyyah, Tunis