par Yahya » Lun Nov 14, 2011 2:26 am
bismi-Llah er-Rahmân er-Rahîm wa sall-Allah ala Seyydina Mohammedin wa ala Ali-hi wa Sahbi-hi wa sallam
wa alaykum as-Salâm wa rahmatu-Llah,
Les Racines Linguistiques Du Mot Tassawwouf
Il y a quatre racines données au mot tassawwouf. La première dérive du mot Arabe safa ou safw qui signifie pureté comme du cristal et limpide comme de l’eau. Le Prophète (saw) compara le monde à une petite eau de pluie sur un plateau de montagne dont la limpidité (safw) avait déjà été bue et dont la lie (kadar) seulement restait[1]; et il appela la Syrie la plus pure des terres d’Allah[2] après la Mecque et Madina. Ibn al-Athir défini le mot dans son dictionaire al-Nihaya comme «le meilleur de tout sujet, sa quintessence, et sa partie la plus pure.»[3]
Une autre racine dérive de Ahl al-Soufa, (les gens du Banc), qui furent ceux qui vivaient dans la mosquée du Prophète (saw) de son vivant et qui furent mentionnés dans le Coran au verset suivant:
«(O Mouhammad,) Résigne-toi à la compagnie de ceux qui invoquent leur Seigneur matin et soir désirant Sa Face; et ne laisse pas tes yeux se détourner d’eux, voulant le luxe de ce bas-monde; et n’obéis pas à celui dont nous avons rendu le cœur inattentif à Notre Rappel, qui poursuit sa passion et dont le comportement est outrancier.» (.18:.28)
Ce verset insiste sur la nécessité des croyants à se maintenir dans un état permanent de dhikr, le Souvenir d’Allah avec la bouche (la langue), dans l’esprit, et à travers le cœur. Cette racine est parfois comparée à ahl al-Saff, ou «les Gens du Rang», dans le sens de «premier rang», comme le premier rang est béni et les soufis sont l ‘élite de la communauté.
La troisième de ces racines est al-souf ou laine, comme ce fut la coutume des gens pieux de Koufa de s’en revêtir. La quatrième racine linguistique dérive de souffat al-kaffa ou éponge molle en référence au soufi dont le cœur est très mou à cause de sa pureté. Ceci est la raison pour laquelle le Prophète (saw) montra toujours sa préoccupation pour ses Compagnons, en vue de purifier leurs cœurs et de leur montrer que le progrès du «soi» est basé sur un cœur débarrassé de toutes les imperfections internes et externes.
Le Prophète (saw) Mentionne La Condition Du Cœur: La Suprématie Du Cœur Sur Tous Les Autres Organes
Le cœur est le siège de la sincérité en une personne sans lequel aucune de ses actions ne sont acceptées. Le Prophète (saw) dit dans Boukhari: «Sûrement il y a dans le corps un petit morceau de chair; s’il est en bon état le corps entier est en bon état, et s’il est corrompu le corps entier est corrompu et c’est le cœur»; et il dit dans deux autres hadiths rapportés par Mouslim: «Sûrement Allah ne regarde pas vos corps ni vos faces, mais Il régarde vos cœurs» et «N’entrera au paradis quiconque a même un atome d’orgueil en son cœur.» Plusieurs autres hadiths citent explicitement la primauté du cœur:
Abou Hourayra rapporte: «Je dis: O Messager d’Allah! Qui sera le premier à bénéficier de ton intercession au jour de la résurrection?» Le Messager d’Allah dit: «O Abou Hourayra! Je savais que personne ne pouvait me demander cette question avant toi à cause de ton grand désir pour la connaissance de hadiths. Le premier à bénéficier de mon intercession au jour de la résurrection est celui qui dit «Il n’y a de Dieu qu’Allah» purement et sincèrement de son cœur (qalb) ou de son âme (nafs).»[4] Ibn Hajar dit dans son commentaire sur Boukhari:
Le Prophète (saw) mentionna le cœur pour insister, comme Allah dit à propos du pécheur: «Certes, il a un cœur pécheur» (2:283)… «Le Premier» fait allusion à leur différent ordre d’entrée au paradis comme distinct dans leur rang de sincérité, cette dernière qualité étant mise en valeur par son dire «de son cœur» quoiqu’il soit clair que le siège de la sincérité est le cœur. Cependant, l’attribution de l’action à cet organe est plus accentuée.[5]
L’un des Compagnons nommé Wabissa rapporte que les gens avaient l’habitude de demander au Prophète (saw)des questions au sujet des bonnes choses, mais lui se résolu de lui demander qu’au sujet de mauvaises choses. Lorsqu’il vint au Messager de Dieu, celui-ci le tapota sur la poitrine avec ses doigts et dit par trois fois: «O Wabissa, la peur d’Allah est là.» Ensuite il dit: «Demande la réponse à ton coeur, peu importe celle des autres. »[6]
De la part d’Oumar: Le Prophète (saw) dit: «Toute chose a une cire, et la cire du cœur est dhikr Allah. Rien ne sauve une personne de la punition plus que le dhikr Allah.» Ils dirent: «Même pas le jihad pour l’amour d’Allah?» Il dit: «Non, même si vous combattez jusqu’à ce que vos sabres se brisent.»[7]
Ibn `Oumar rapporte: J’étais assis avec le Prophète (saw) lorsque Hamala ibn Zayd al-Ansari de la tribu des Banou Haritha vint à lui. Il s’assit en face du Messager d’Allah (saw) et dit: «O Messager d’Allah, la croyance est là» – et il montra sa langue du doigt – «et l’hypocrisie est là» -- et il montra son coeur du doigt – «et je ne fais pas assez de dhikr Allah à l’exception d’un petit nombre.» Le Messager d’Allah demeura silencieux. Hamala répèta ses mots au cours desquels le Prophète(saw) saisi sa langue par son extrémité et dit: «O Allah, donne lui une langue véridique et un cœur reconnaissant, et fait qu’il m’aime et aime tous ceux qui m’aiment, et dirige ses affaires vers le succès.» Hamala dit: «O Messager d’Allah, j’ai deux frères qui sont hypocrites; j’étais juste avec eux. Ne dois-je pas les conduire à toi (afin que tu pries pour eux)?» Le Prophète (saw) dit: «(oui), quiconque vient à nous de la manière dont tu es venu, nous demanderons le pardon pour eux comme nous avons demandé le pardon pour toi; et quiconque maintien cette voie, Allah devient son protecteur.»[8]
De Ibn `Oumar aussi: le Prophète (saw) dit: «Ne parlez pas beaucoup, faites le dhikr Allah; parler beaucoup sans faire le dhikr Allah endurci le cœur, et personne n’est plus éloigné d’Allah que celui qui a un cœur dur.»[9]
Nous voyons que le Prophète(saw) liait toute chose à la condition du cœur. Lorsque nous éliminons nos mauvais caractères et que nous endossons les bonnes manières, nous aurons un cœur parfait et sain; Ceci est la raison pour laquelle Allah mentionne dans le Coran: «Le jour où ni les biens, ni les enfants ne seront d’aucune utilité, sauf celui qui vient à Allah avec un cœur saint.» (26:88-89). Et Allah mentionne les cœurs de Ses vrais savants (`oulama) lorqu’Il dit: «Il consiste plutôt en des versets évidents, (préservés) dans les poitrines de ceux à qui le savoir a été donné. Et seul les injustes renient nos versets.»
Quelles sont les maladies du cœur? L’Imam Souyouti dit dans son livre sur la tariqa Chadhili: «La science des cœurs, la connaissance de ses maladies comme la jalousie, l’arrogance et la vanité, est une obligation pour tout Musulman de s’en débarrasser.»[10] Les exégètes disent que la jalousie (hassad), l’ostentation (al-riya’), l’hypocrisie (al-nifaq) et la haine (al-hiqd) sont les caractères les plus communs auquels Allah fait référence lorsqu’Il dit: «Dis: Mon Seigneur m’a interdit les turpitudes tant apparentes que secrètes» (7:33). Allah mentionnant «tant apparent que secret» est l’évidence de la nécessité pour toute personne de ne pas seulement corriger et parfaire les actions extérieures, mais de purifier celles qui sont cachées en son cœur et qui sont seulement connues de son Seigneur.
Le tassawwouf est la science et la connaissance par laquelle on apprend à purifier le moi des mauvais désirs de l’égo, comme la jalousie, la tricherie, l’ostentation, l’amour des éloges, la vanité, l’arrogance, la colère, l’avidité, la radinerie, le respect du riche au dépend du pauvre, tout comme on doit purifier son aspect externe. La science de tassawwouf enseigne la purification selon le Saint Coran et la Sunna du Prophète (saw) et enseigne à se vêtir des attributs parfaits (al-sifat oul-kamila) dont la repentance (tawba), la peur de Dieu (taqwa), se maintenir dans le droit chemin (istiqama), la franchise (sidq), la sincérité (ikhlas), l’abstentation (zouhd), la grande piété (wara’), se remettre à Allah (tawakkul), accepter le Destin (rida), s’abandonner à Allah (taslim), les bonnes manières (adab), l’amour (mahabba), le souvenir (dhikr), la méditation (mouraqaba), et plusieurs autres qualités trop nombreuses pour être énumérées ici.
Tout comme la science du hadith a des douzaines de classifications, de même la science de tassawwouf a plusieurs classifications à savoir, les bonnes caractéristiques (akhlaq hassana) que le croyant doit obligatoirement développer, et les mauvaises (akhlaq dhamina) qu’il doit obligatoirement éliminer, en vue d’atteindre l’état d’ihsan. Les bénéfices et les buts de la science de tassawwouf rendent manifestes en nous le coeur de l’Islam, sa précieuse essence et sa force. En effet, l’Islam n’est pas seulement une pratique externe, mais il a aussi une vie interne. Ceci est la raison pour laquelle Allah dit: «Evitez le péché apparent ou caché» (6:120) et «Il y a parmi les croyants, des hommes qui ont été sincères dans leur engagement envers Allah» (33:23). Ceci signifie que tous les croyants ne sont pas inclus dans ce groupe sélectionné de «ceux qui ont tenu leur engagement envers Allah.» En d’autres termes l’on peut être croyant, mais ne pas être parmi ceux qui ont tenu leur engagement à moins que l’on est atteint l’état de la purification de soi, l’état d’ihsan, la perfection du caractère, que le Saint Prophète (saw) mentionna dans le Saint Hadith. Et ceci, comme nous l’avons maintenant rendu clair, est ce qui fut connu plus tard comme étant la science du tassawwouf.
Y-A-T’Il DES PREUVES ET DES EVIDENCES DANS LE CORAN AU SUJET DU TASSAWWOUF? CITEZ-LES DE MANIERES EXPLICITES.»
Allah Décrit Tazkiyat Al-Nafs Comme Un Devoir Du Prophète
Comme mentionné précédemment, l’évidence du tassawwouf à partir du Coran est la même que l’évidence pour tazkiyat al-nafs ou la purification du soi, qui a été établie dans les paragraphes antérieurs comme la définition du tassawwouf. Allah dit: «C’est Lui qui a envoyé à des gens sans Livre un Messager des leurs qui leur récite Ses versets, les purifie et leur enseigne le Livre et le Sagesse, car ils étaient auparavant dans un égarement évident» (62:2). Le terme utilisé ici est wa youzakkihim (les purifie). Les différents sens des différentes racines du mot tazkiya en arabe sont:
· zaka: «il nettoya» ou «il fut propre»
· youzakki «netttoyer» et «être purifier»
· tazkiya «purification»
· zakat «la taxe Islamique pour le nécessiteux,» «charité» «pureté»
· azka «la plus pure»
· zaki «pur, innocent»
Allah dit dans un autre verset: «Et par l’âme et Celui qui l’a harmonieusement façonnée et lui a alors inspiré son immortalité, de même que sa piété! A réussi, certes, celui qui la purifie. Et est perdu, certes, celui qui la corrompt.» (91:7-10) Ce verset du Coran fait état de la nécessité de purifier et de maintenir propre le nafs en vue de réussir dans cette vie et dans l’au-delà: et ceci est précisément le but du tassawwouf. Les versets suivants sont rélatés pour une telle auto-purification.
D’autres Versets Et Commentaires Sur Tazkiyat Al-Nafs
Des versets se référant à la purification et à la purification du soi dans le Coran ont été déjà mentionnés. Allah dit:
· «Notre Seigneur! Envoie l’un des leurs comme messager parmi eux, pour leur réciter Tes versets, leur enseigner le Livre et la Sagesse, et les purifier.» (2:129)
· «Ainsi, Nous avons envoyé parmi vous un messager de chez vous qui vous récite Nos versets, vous purifie…» (2:151)
· «Réussit, certes, celui qui se purifie, et se rappele le nom de son Seigneur, puis prie.» (87:14-15)
· «Et quiconque se purifie, ne se purifie que pour lui-même, et vers Allah est la Destination.» (35:18)
[1] Dans Ibn ‘Assakir de la part d’Ibn Mas’oud. Al-Qouchayri et al-Houwjiri le citent dans leurs chapitres sur le tassawwouf, respectivement dans Kashf al-mahjoub (La traducttion de Nicholson p.35) et al-Risala: traduction de B.R. Von Schlegell, les principes du soufisme (Berkeley, Mizan Press, 1990) p.301.
[2] Tabarani le cita et Haythami authentifia la chaîne à travers ‘Irba ibn Sariya dans Majma’al-zawa’id, chapître sur les mérites de la Syrie.
[3] Ibn al-Athir, al-Nihaya, s.v.s-f-w.
[4] Bukhari le rapporte (english 1:79).
[5] Ibn Hajar, Fath al-bari (1989 ed.) 1:258 et 11:541.
[6] Rapporté dans Ahmad, Tabarani, Abou Ya’la et Abou Nou’aym.
[7] Bayhaqi le rapporte dans “Shou’ab al-iman 1:396 #522; al-Moundhiri dans al-Targhib 2:396; et Ibn Abi al-Dunya.
[8] Al- hafiz Abou Nou’ayn le rapporta dans Hilyat al-awliya. Ibn Hajar dit dans al-Isaba (2:2 #1659): “Sa chaîne de transmission est acceptable et Ibn Mindah le soumit aussi. Nous avons rapporté la même à travers Abou al-Darda’ dans le Fawa’id de Hisham ibn ‘Ammar.” Al-Tabarani aussi le rapporte à travers Abou al-Darda’. Haythami dit de cette chaîne: “Elle contient un narrateur inconnu, mais le reste est fiable.”
[9] Tirmidhi le rélate et dit: un hadith rare(gharib); Bayhaqi aussi dans le shou’ab 4:245 #4951.
[10] Ssuyuti, Ta’yid al-haqiqa al-‘aliyya wa-tashyid al-tariqa al-shadhiliyya, ed. Abd Allah ibn Muhammad ibn al-Siddiq al-Ghumani al-Hassani (Cairo: al-matba’ al-izlamiyya, 1934), p, 56.