La descente de Zaghouan (B.C.A.H.C)

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Cet article est issu de notre traduction de Durrat el-asrâr wa tuhfat el-Abrâr (Imâm Ibn çabbâgh) publiée en PDF sous le titre «Biographie du Cheikh Abû-l-Hassan Châdhilî (B.C.A.H.C)» .

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Le Pieux Cheikh Abû al-Hasan ‘Alî  el-Ibrî, connu sous le nom d’el-Hattâb, nous raconte :

« Un jour, je dis sîdî Mohammed el-Habibî : « Dis-moi quelque chose que tu as vu de mon Maître Abû el-Hassan.»

Il répondit :

« J’ai vu plusieurs choses le concernant, et je vais t’en raconter certaines. Je restais avec lui sur le mont Zaghouân pendant quarante jours, me nourrissant d’herbes des champs et de feuilles de laurier jusqu’à ce que l’intérieur de mes joues en devienne douloureux. Il me dit alors:

–      Ô Abdallah, il semble que tu aies envie d’un repas.

–      Ô mon Maître, mon regard sur toi m’en dispense, répondis-je.

–      Demain, in châ Allah, nous descendrons à Châdhilah et plusieurs prodiges (karamât) surviendront sur le chemin.

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Montagne de Zaghouân

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Le lendemain matin suivant nous descendîmes de bonne heure et, pendant que nous marchions à travers la plaine, il me dit : « Ô Abdallah, si je quitte la route, ne me suis pas. »

Un état spirituel très puissant lui survint et il quitta le chemin jusqu’à être loin de moi. Alors je vis quatre oiseaux de la taille d’une cigogne descendre du ciel et étendre leurs ailes au-dessus sa tête. Ils virent chacun leur tour converser avec lui, puis s’envolèrent. Il y avait également avec eux des oiseaux de la taille des hirondelle, tournant autour de lui (yatûfûn hawla-hu), entre terre et horizon, qui disparurent ensuite hors de ma vue. Revenant vers moi, il me dit :

–     Ô ‘Abdallah, as-tu vu quelque chose ?

Je lui racontai ce que j’avais vu et il m’expliqua :

–     Les quatre oiseaux sont les anges du quatrième ciel qui sont venus me questionner à propos d’une science (‘ilm) et je leur ai répondu. Quant aux oiseaux qui avaient une forme d’une hirondelle, c’étaient les esprits des saints venus à moi pour recevoir une bénédiction de notre arrivée 1

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Il resta sur la montagne de Zaghouân pendant un certain temps et Allah fit surgir une source dont s’écoulait de l’eau douce. Il avait là une grotte dans laquelle il résidait. De nos jours, l’appel à la prière se fait entendre du pied de la montagne aux heures de prière, et les gens y montent mais n’y trouvent personne, et personne ne l’habite excepté ses compagnons parmi les djinns croyants.

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Fond du puits de Zaghouan

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Le Cheikh Abû el-Hassan raconte également :

« On m’a dit :

–       Ô ‘Alî , descends (ihbit) vers les gens afin qu’il puissent profiter de toi.

–     Ô Seigneur, répondis-je, délivre-moi des hommes, je n’ai pas la capacité de me mêler à eux.

–     Descends (anzil) ! Car Nous t’avons fait accompagner de la sécurité (salâmah) et Nous avons retiré de toi le blâme (malâmah).

–     Ô Seigneur, si Tu me destines (takilnî) aux [mains des] hommes, je devrais manger de leur pitance.

–     Dépense, Ô ‘Alî , car Je suis le Pourvoyeur (malî), si tu veux, à partir de ta poche (jayb), et si tu veux, à partir du monde invisible (ghayb). »

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  1. René Guénon dit dans un article intitulé La Langue des Oiseaux : « Il est souvent question, dans diverses traditions, d’un langage mystérieux appelé « langue des oiseaux » : désignation évidemment symbolique, car l’importance même qui est attribuée à la connaissance de ce langage, comme prérogative d’une haute initiation, ne permet pas de la prendre littéralement. C’est ainsi qu’on lit dans le Qorân : « Et Salomon fut l’héritier de David ; et il dit : O hommes ! nous avons été instruit du langage des oiseaux (ullimna mantiqat-tayri) et comblé de toutes choses… » (XXVII, 15.) […] C’est cette communication qui est représentée par la compréhension du langage des oiseaux ; et, en fait, les oiseaux sont pris fréquemment comme symbole des anges, c’est-à-dire précisément des états supérieurs ». Guénon dit ensuite à propos du verset coranique « Wa eç-çâffâti çaffan, Faz-zâjirâti zajran, Fat-tâliyâti dhikran… (« Par ceux qui sont rangés en ordre, Et qui chassent en repoussant, Et qui récitent l’invocation… ») (XXXVII, 1-3) : « Dans le texte qorânique que nous avons reproduit ci-dessus, le terme eç-çaffât est considéré comme désignant littéralement les oiseaux, mais comme s’appliquant symboliquement aux anges (el-malaïkah) ; et ainsi le premier verset signifie la constitution des hiérarchies célestes ou spirituelles. Le second verset exprime la lutte des anges contre les démons, des puissances célestes contre les puissances infernales, c’est-à-dire l’opposition des états supérieurs et des états inférieurs. Enfin, dans le troisième verset, on voit les anges récitant le dhikr, ce qui, dans l’interprétation la plus habituelle, est considéré comme devant s’entendre de la récitation du Qorân, non pas, bien entendu, du Qorân exprimé en langage humain, mais de son prototype éternel inscrit sur la « table gardée » (el-lawhul-mahfûz), qui s’étend des cieux à la terre comme l’échelle de Jacob, donc à travers tous les degrés de l’Existence universelle ». []

par le 3 mai 2012, mis à jour le 26 août 2018