L’amour du bien-aimé – Cheikh ‘Alî Al-Jamal

Ilâ ahbâbinâ :
« hibbin ‘an hibbin fi hubbi » 1

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Nous présentons un nouvel extrait du livre du Cheikh Sidî ‘Alî Al-‘Amrânî Al-Jamal relatif à l’amour du bien-aimé. Ce bien-aimé (habîb) est ici à la fois le Prophète ﷺ , Allah – Exalté soit-Il – ou encore le murîd lui-même.

L’absence de majuscules en arabe, auxquelles nous avons parfois renoncé également pour ce terme dans notre traduction, ainsi que celle des formules eulologiques habituelles consacrées respectivement à Allah et Son Prophète ﷺ – qui permettent habituellement de différencier l’un de l’autre lors de l’usage d’un qualificatif commun – augmentent la perplexité du lecteur 2 et lui rappellent que l’Amour (Mahabbah), dans ses plus hauts degrés, n’est qu’un des nombreux vêtements dans lesquels se drape la doctrine de l’Identité suprême (Tawhîd). Cette interrogation sur l’identité du bien-aimé est par ailleurs renforcée, et stimulée en quelque sorte, par le caractère répétitif et proprement incantatoire de ce passage, comme si le cheikh voulait amener son interlocuteur, également par la forme même de son propos, à s’engager dans la voie de l’amour ardent, « unitif », et à en goûter les fruits par lui-même, w’Allahu a’lam !

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L’amour du bien-aimé

Mahabbatu-l-habîb

Il a dit : «  Sache mon frère qu’il n’y a dans l’existence de Vrai ni de Vérité en dehors d’Allah. Il a dit – exalté soit-Il : « Où que vous vous tourniez, là est la Face d’Allah   3  » et à Allah appartiennent des Voies (tarâ’iq) aussi nombreuses que les âmes des créatures (khalâ’iq). La porte à laquelle aboutissent 4 toutes ces Voies c’est notre bien-aimé, notre maître Mohammed ﷺ ; il est la Porte par laquelle Allah a scellé les Voies de l’Arrivée (Wuçûl) à Lui et il a interdit à celui qui n’emprunte pas la porte du bien-aimé (al-habîb) de parvenir au Bien-aimé, il a interdit à celui qui n’aime pas le bien-aimé d’aimer le Bien-aimé, il a interdit à celui qui n’a pas un amour ardent du bien-aimé de parvenir au Bien-aimé, il a interdit à celui qui n’est attaché fermement au bien-aimé d’être sauvé par le Bien-aimé, il a interdit à celui qui ne se conforme pas au Bien-aimé d’être guidé vers le bien-aimé, il a interdit à celui qui parvient par une porte autre que celle du bien-aimé d’avoir une part de l’amour du Bien-aimé, et les Hommes [véritables] différent dans leurs degrés de proximité du Bien-aimé à la mesure de l’amour qu’ils portent au bien-aimé, il n’y a pas de remède plus rapide pour l’amoureux ardent (‘âchiq) rempli d’affliction que l’amour du bien-aimé. Par Allah, il n’y a pas dans l’existence de bien-aimé pour le Bien-aimé si ce n’est celui dont le cœur est empli de l’amour du bien-aimé. Par Allah tu ne seras pas un bien-aimé du bien-aimé tant qu’il ne te sera pas plus cher que tout autre bien-aimé. Par Allah, si ton investiture (khirqah) était l’amour du bien-aimé, tu serais plus proche (aqrab) du Bien-aimé que tout autre rapproché (qarîb). Par Allah, si tu étais consumé par la flamme de l’amour du bien-aimé tu ne contemplerais dans l’existence rien d’autre que le Bien-aimé. Par Allah, si tu étais éteint à tout autre que le bien-aimé tu serais, toi, amant (muhibb) et, toi, bien-aimé. Par Allah, si tu délaissais les ennemis et que tu ne t’occupais que du bien-aimé, le plus grand des ennemis (a’dâ-l-a’âdî) deviendrait pour toi un bien-aimé. Par Allah, si tu étais le bien-aimé du bien-aimé tu traiterais de manière égale l’ennemi et le bien-aimé ».

Cheikh ‘Alî Al-Jamal

Notes du traducteur

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  1. « Chant de l’Identité Suprême (Tawhîd) » []
  2. Dans le cas où nous écrivons « Bien-aimé » avec une majuscule, il s’agit d’Allah, selon le sens manifeste du texte. Dans d’autres cas moins évidents, sur la fin du passage traduit principalement, nous avons préféré conserver l’ambivalence du texte original, certainement voulue par le cheikh. []
  3. Al-Baqarah : 115 []
  4. Litt. : sont réunies. []

par le 9 juillet 2015, mis à jour le 10 juillet 2015

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