L’islam de René Guénon – M.A.S.

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Nous voulons, par ce titre, désigner le moment nécessaire où René Guénon est devenu extérieurement musulman et avant lequel il ne l’était extérieurement pas. Il nous apparaît en effet, quel que soit le terme que l’on emploie pour désigner ce moment, qu’il dut affirmer un jour la double chahâdah puis se mettre à pratiquer un certain nombre de rites extérieurs obligatoires, toutes conditions qui font que l’être qui les remplit, quel qu’il soit sur la terre d’Allah ta’âlâ depuis plus de quatorze siècles, acquiert ainsi pleinement le statut de musulman.

La date de cet évènement n’ayant apparemment pas été déclarée publiquement ni en privé par René Guénon1 ou par quiconque, nous ne la connaissons pas en tant que telle (si tant est qu’il soit d’ailleurs important de la connaître) 2 .

Nous connaissons, par contre et parce qu’elle a pu être approximativement déduite à partir de correspondances privées, la période qui est habituellement retenue (1910) comme celle de son rattachement au Taçawwuf 3 .

Nous sommes ainsi amené à penser que René Guénon est devenu musulman en 1910, approximativement.

Bien que cette manière de voir les choses nous semble en elle-même largement suffisante et satisfaisante, nous demandons à toute personne éventuellement mieux informée, de bien vouloir nous faire savoir :

  • la date de son islam (tel que défini ci-dessus), si elle était différente de celle que nous retenons, et
  • ce qui établirait de manière certaine que René Guénon n’aurait éventuellement pas pratiqué un certain nombre de rites exotériques minimaux depuis la période de son rattachement au Taçawwwuf islamique (1910).

Faute de quoi, nous nous tiendrons personnellement à cette position, in châ Allah.

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Annexe

  1. Référence de la lettre de René Guénon en anglais (« Aux yeux du musulman que je suis ») 4
  2. Extrait d’une lettre de René Guénon à Daniélou sur sa « conversion »

On a avancé ici ou là et depuis assez longtemps l’argument énoncé par Guénon lui-même concernant la question de sa « conversion ». Voici ce qu’en dit l’auteur à Daniélou 5.

« Ce qui m’a beaucoup étonné aussi, c’est le regret de n’avoir pas de renseignements biographiques sur moi ; c’est là une chose à laquelle je me suis toujours opposé formellement, et avant tout pour une raison de principe, car, au regard de la doctrine traditionnelle, les individualités ne comptent pour rien et doivent disparaître entièrement…  Mais, malgré cela, je suis obligé tout au moins de rectifier les assertions erronées quand il s’en produit ; par exemple, je ne puis laisser dire que je suis « converti à l’islam », car cette façon de présenter les choses est complètement fausse ; quiconque a conscience de l’unité essentielle des traditions est par là même « inconvertissable » à quoi que ce soit, il est même le seul qui le soit ; mais il peut « s’installer », s’il est permis de s’exprimer ainsi, dans telle ou telle tradition suivant les circonstances, et surtout pour des raisons d’ordre initiatique. J’ajoute à ce propos que mes liens avec les organisations ésotériques islamiques ne sont pas quelque chose de plus ou moins récent comme certains semblent le croire ; en fait, ils datent de bien près de 40 ans… »

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Remarques générales conclusives

Nous nous contenterons simplement de faire remarquer à qui saura le comprendre (plus de cent ans après les faits …) qu’il n’est pas logique de prendre l’argument en question pour dire que René Guénon ne serait pas devenu extérieurement musulman, d’une manière ou d’une autre, avant ou lors même du rattachement au Taçawwuf  islamique.

L’évocation de la possibilité, somme toute très exceptionnelle quoiqu’il en soit, de s’ « installer » dans une forme traditionnelle pour des raisons en l’occurrence principalement d’ordre initiatique concerne la motivation de l’action tout en affirmant positivement qu’il s’agit bien de s’ « installer ». Mais cette possibilité n’exclut sous aucun rapport, ni logique ni traditionnel, le passage extérieur effectif, préalable ou concomitant, à la forme traditionnelle concernée, en l’occurrence l’Islam. Sans preuve du contraire, il est donc à la fois possible, logique, normal et régulier de penser, a priori et quels qu’aient été alors sa motivation et son état, que René Guénon est devenu musulman lors de son rattachement au Taçawwuf, son islam précédant logiquement et traditionnellement son rattachement.

Comme bien souvent en de telles situations, il semble qu’il faille donc être en mesure d’apporter des arguments suffisamment fiables en sens inverse lorsque l’on veut évoquer une situation qui serait extérieurement anormale, surtout s’il s’agit d’une personne que l’on considère soi-même comme une référence et une autorité traditionnelle.

w-Allahu a’lam

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Article connexe

25 – Est-il envisageable d’être rattaché à une tarîqah alors que l’on n’est pas musulman ? – (M.A.S.)

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  1. On sait néanmoins qu’il se qualifie lui-même d’ « islamite » en juillet 1911, dans une correspondance écrite en anglais qu’il signe Abdul-Wâhid ; cf. l’annexe 1 []
  2. Comme on va le voir ci-dessous, le rattachement est nécessairement ultérieur à la prononciation de la double chahâdah []
  3. Ou peut-être devrions même dire à différentes « organisations ésotériques islamiques », à en croire ce que l’on voit diffusé ici ou là de ses échanges épistolaires ; cf. l’annexe 2 []
  4. On remarque néanmoins que la formulation anglaise correspondante semble ne pas être intégralement traduite []
  5. Lettre de René Guénon à A. Daniélou, le 27 août 1947. Référence à venir, in châ Allah []

par le 30 juin 2015, mis à jour le 12 juillet 2015

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